Les semences sont la source de l’agriculture biologique, et un élément incontournable de la biodiversité. Et s’il est question de protéger cette fameuse biodiversité, il est alors impératif de maintenir une multiplicité d’espèces végétales à la portée de tous les paysans, tant dans la pratique que dans le commerce des semences. Biocoop, réseau de magasins bio en France dénonce une réalité des semences bio qui est toute autre : « les pratiques du commerce des semences ne sont pas favorables à la préservation de l’agro biodiversité ».
Au sens large, la semence est l’organe de la plante qu’on a choisi d’utiliser pour la multiplier (graine, bouture, tubercule, plant et rhizome). Il y a une dizaine d’années, elle était collectée, triée, maintenue, sélectionnée, échangée et multipliée par ceux qui les produisaient dans leurs champs rappelle Biocoop, reprenant les propos du Réseau semences Paysannes.
Et de rappeler que pour avoir le droit de vendre et d’échanger ses propres semences, un agriculteur est obligé de les inscrire sur un catalogue officiel, régi par des règles astreignantes et un coût d’inscription onéreux : « aujourd’hui les coûts d’inscription d’une espèce au Catalogue Officiel des espèces et des variétés cultivées s’élèvent, pour les grandes cultures, à 15 000 euros. Certains agriculteurs sont alors parfois contraints à l’illégalité ».
Pour le Réseau Semences Paysannes, « alors qu’une toile réglementaire d’une complexité inouïe se tisse autour des semences menaçant le droit fondamental de multiplier, ressemer et échanger le grain récolté, les résistances pour changer la réglementation sur la commercialisation des semences s’organisent ».
« Il y a un vide juridique autour des semences paysannes qui amène certains agriculteurs à se protéger autrement et à trouver des solutions alternatives »explique Valérie Chable, chercheuse à l’INRA Rennes. C’est le cas de l’association de producteurs Kaol Kozh (Bretagne) dont les semences sont la copropriété de tous ses adhérents. « En nous appuyant sur nos statuts, nous pouvons, entre adhérents, échanger, partager nos semences qui sont elles mêmes, produites et sélectionnées par une autre partie de nos adhérents ! » commente René Léa, président de l’association Kaol Kozh (vieux chou en breton et bien commun en russe).
Pour Biocoop, le marché des semences paysannes est majoritairement dominé par de grands semenciers industriels qui choisissent de mettre sur le marché les semences qu’ils jugent les plus rentables. En résulterait une érosion massive de la diversité agricole – plus particulièrement en agriculture biologique – et un non-respect de la saisonnalité des produits. Le réseau de magasins alerte sur la disparition de nombreuses variétés anciennes comme les choux de Lorient ou encore les haricots coco de Pont l’Abbé alors qu’à l’inverse, quelques espèces de tomates ou de fraises sont proposées en toutes saisons !
Selon Vincent Lestani, Directeur de la CABSO (Coopérative des agriculteurs biologistes du Sud Ouest), « Chaque région a sa spécificité et les paysans adaptent leurs cultures à leurs terroirs. Ces richesses du patrimoine agricole sont désormais oubliées des gros semenciers. De plus, il existe très peu de semences bio : elles ne sont pas jugées suffisamment rentables par les industriels donc très peu exploitées ».
Yves Heuillard
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